Ces enfants
Ces enfants se départageaient en trois catégories : les Infirmes Moteurs Cérébraux qui étaient les plus nombreux ; les myopathes qui venaient ensuite, et enfin les traumatisés crâniens. Ils étaient tous si je puis dire "dans un sale état" et de voir de jeunes êtres qui devaient baigner dans l’innocence et l’insouciance brisés, dans leurs fauteuils roulants et dans leurs esprits, me fendait le cœur. Ce que l’on appelle les troubles associés les rendaient maladroits, diminués intellectuellement... différents de nous. Toi qui ne marche pas, qui ne marcheras jamais, toi qui ne parle pas, toi qui ne me comprends pas... et lorsque j’ai posé la question, j’ai été tellement choquée de la réponse ! "Non, ils n’évolueront jamais, si ce n’est dans le mauvais sens du terme." J’entends déjà mon amie d’enfance me dire "et oui on n’est pas dans le monde des bisounours ma vieille !" C’est vrai que j’espérais une fin heureuse, encore, toujours. De jeunes personnes handicapés qui deviendront de vieilles personnes handicapés, telle est la vérité, leurs destins. Certains même ne vieilliront pas. Et lorsque j’essayais désespérément d’accrocher le regard de ce jeune à qui je parlais, lorsque j’aurai voulu qu’il me réponde, lorsque je cherchais un contact même infime, que je n’ai pas eu... Je n’ai pas pu m’empêcher de penser au sens de tout ça, pourquoi l’acharnement thérapeutique ? Est-ce vraiment... nécessaire ? Je vois déjà les gens crier, "comment peut-elle dire cela !"... je l’ai juste pensé, une seconde. Pardon. Ce fut ma première impression. Puis j’ai vu autre chose, les rires, les joies de chacun, je n’ai plus vu des enfants handicapés mais des enfants a part entière. J’ai vu des jeux, de société notamment, du sport en fauteuil, des compétitions, de la musique... tellement de choses ! Ce que je sais, c’est que j’ai vu des êtres humains. Aujourd’hui je vois la maladie mais elle ne prends plus toute la place, je les vois eux, aussi.